Par Franck Beaudoin, avocat, FB Juris
Publié sur idroit.co le 29 juin 2018 – Actualisé le 25 juin 2019
Guide juridique
Délai de six mois pour l’approbation des comptes – Les dirigeants de sociétés doivent s’assurer que les comptes annuels et les autres documents prévus par la loi et les règlements (notamment le rapport de gestion, et si applicable les rapports des commissaires aux comptes) seront soumis à l’assemblée générale ou à l’associé unique dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice social.
Ce délai de six mois est obligatoire pour la plupart des sociétés commerciales, notamment :
- pour la société anonyme (SA) – article L. 225-100 alinéa 1 du code de commerce,
- pour la société à responsabilité limitée pluripersonnelle (SARL) – article L. 223-26 alinéa 1 du code de commerce,
- pour l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL ou SARL unipersonnelle) – article L. 223-31 alinéa 2 du code de commerce,
- pour la société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) – article L. 227-9 alinéa 3 du code de commerce.
Étonnamment, le délai de six mois s’impose à la SASU et non à la SAS pluripersonnelle. Pour cette dernière, il faut vérifier si un délai est prévu par les statuts.
Demande de prolongation (ou de prorogation) du délai – Si le délai d’approbation des comptes ne peut être tenu, il est nécessaire de demander une prolongation du délai au président du tribunal de commerce territorialement compétent, statuant sur requête. Cette possibilité est prévue expressément par les dispositions législatives et réglementaires pour la SA et pour la SARL pluripersonnelle.
En revanche, elle n’est pas prévue pour l’EURL ni pour la SASU ni pour la SAS. À notre avis, si le délai d’approbation des comptes ne peut pas être respecté dans ces sociétés, même en l’absence de disposition expresse, il convient de solliciter une prorogation du délai en s’adressant au juge.
Forme – La demande de prolongation prend la forme d’une simple requête, c’est-à-dire en pratique un courrier adressé au président du tribunal de commerce compétent. Il convient de l’expédier par courrier recommandé avec demande d’avis de réception ou de la déposer directement au greffe contre récépissé.
Pour une SARL, la requête doit être présentée par le gérant (article L. 223-26 alinéa 1 du code de commerce). Pour une société anonyme, la requête doit être présentée par le conseil d’administration ou le directoire, selon le cas (article R. 225-64 du code de commerce).
Le greffe du tribunal de commerce de Paris demande que la requête soit déposée en deux exemplaires originaux, datés et signés par “le représentant légal” (source : site Internet du greffe le 29 juin 2018). Cela ne pose pas de difficulté pour la SARL, dont le représentant légal est le gérant. Pour la SA à conseil d’administration, le représentant légal est soit le président directeur général (SA moniste), soit le directeur général (SA dualiste) et éventuellement le directeur général délégué, mais pas le conseil d’administration lui-même (article L. 225-56 du code de commerce). Pour la SA à directoire et conseil de surveillance, le représentant légal est soit le président du directoire soit le directeur général unique, et éventuellement le directeur général (article L. 225-66 du code de commerce).
Délai pour formuler la requête – La demande doit idéalement être présentée au juge avant l’expiration du délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice social. Cependant, aucun délai n’est fixé par les textes. Le greffe du tribunal de commerce de Paris considère qu’il est seulement “recommandé” de formuler la demande avant l’expiration du délai légal de six mois, soulignant qu’il appartient au président du tribunal de commerce d’apprécier la recevabilité de la demande (source : site Internet du greffe le 29 juin 2018).
Délai accordé – Aucun texte n’impose de délai. Il appartient donc au juge d’apprécier le délai approprié. En général, un délai de trois mois est accordé.
Contenu de la demande – Aucun texte ne fixe un contenu précis. S’agissant d’une requête en vue d’obtenir une décision de justice, il est nécessaire de motiver sérieusement la demande.
Le greffe du tribunal de commerce de Paris demande de joindre en annexe la copie du bilan et du compte de résultat de l’exercice précédent et, s’il est établi, le bilan prévisionnel de l’exercice en cours.
Coût – À la date de la dernière vérification de cette page, le tarif de la requête est de 33,03 euros (tarif payable au greffe du tribunal de commerce compétent). Il convient de vérifier le tarif en vigueur.
Obligations comptables et fiscales – La société doit souscrire une déclaration provisoire de ses résultats.
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Extrait du BOFIP : BOI-BIC-DECLA-30-10-10-20-20170217
“2. Déclarations provisoires
120
Lorsqu’un contribuable, ou une entreprise, relevant de l’impôt sur le revenu et arrêtant ses écritures au 31 décembre, éprouve des difficultés pour établir sa déclaration dans le délai, il est admis en pratique qu’une déclaration provisoire soit souscrite dans les conditions et sous les réserves suivantes :
– le contribuable doit justifier des circonstances l’ayant mis dans l’impossibilité de souscrire sa déclaration en temps utile ;
– la déclaration provisoire doit elle-même être souscrite dans le délai légal ;
– une déclaration appuyée des comptes définitifs doit être adressée au service aussitôt que possible.
Enfin, pour être recevable, la déclaration provisoire ne saurait consister simplement en affirmations plus ou moins vagues sur l’ordre de grandeur des résultats de l’exercice écoulé ; elle doit comporter l’indication chiffrée des éléments utiles à l’établissement d’une imposition, même provisoire, tels que ces éléments sont connus à la date de souscription de la déclaration provisoire. Le chef d’entreprise a seulement la faculté de formuler certaines réserves sur les données de la déclaration qui ne peuvent être considérées comme définitives (CE, arrêt du 5 novembre 1955, n° 80763).
130
La même tolérance est admise dans la pratique à l’égard des sociétés dont le bilan n’a pas encore été approuvé dans le délai de dépôt de la déclaration de résultats, lorsqu’il est justifié de l’impossibilité de réunir avant cette date l’assemblée appelée à statuer sur les comptes de l’exercice.
Dans ce cas, la déclaration provisoire doit obligatoirement comporter l’indication des résultats qui seront soumis à l’assemblée générale. Elle ne doit être acceptée qu’appuyée des documents comptables dont la production est prévue au II de l’article 38 de l’annexe III au CGI (cf. V-A § 240 à 355), étant entendu qu’en cas de modifications apportées par l’assemblée générale, des documents rectificatifs doivent être joints à la déclaration définitive. Seule la déclaration définitive des résultats, dûment arrêtés par l’assemblée générale annuelle, est opposable à la société.
140
Il convient enfin de préciser que, en dehors des tolérances dont il vient d’être fait état, le service n’a pas la faculté d’accorder des délais supplémentaires et, les délais légaux étant expirés, il ne peut, en principe, considérer une déclaration comme valable que si elle tend à compléter ou rectifier (cf. III-B-3 §160) une déclaration provisoire régulièrement souscrite dans les délais.
Ce n’est que dans des cas tout à fait exceptionnels et en raison d’un empêchement dûment justifié que des déclarations provisoires ne répondant pas aux prescriptions analysées au III-B-2 § 120 à 140 pourraient être acceptées.”
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Textes
Société anonyme (SA)
Article L. 225-100 alinéa 1 du code de commerce : “L’assemblée générale ordinaire est réunie au moins une fois par an, dans les six mois de la clôture de l’exercice, sous réserve de prolongation de ce délai par décision de justice. Si l’assemblée générale ordinaire n’a pas été réunie dans ce délai, le ministère public ou tout actionnaire peut saisir le président du tribunal compétent statuant en référé afin d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, aux dirigeants de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder”.
Article R. 225-64 du code de commerce : “Le délai de six mois prévu pour la réunion de l’assemblée générale ordinaire par l’article L. 225-100 peut être prolongé, à la demande du conseil d’administration ou du directoire, selon le cas, par ordonnance du président du tribunal de commerce, statuant sur requête”.
Société à responsabilité limitée (SARL)
Article L. 223-26 alinéa 1 du code de commerce : “Le rapport de gestion, l’inventaire et les comptes annuels établis par les gérants, sont soumis à l’approbation des associés réunis en assemblée, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice sous réserve de prolongation de ce délai par décision de justice. Si l’assemblée des associés n’a pas été réunie dans ce délai, le ministère public ou toute personne intéressée peut saisir le président du tribunal compétent statuant en référé afin d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, aux gérants de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder”.
Article R. 223-18-1 du code de commerce : “Le délai de six mois prévu pour la réunion de l’assemblée des associés par l’article L. 223-26 peut être prolongé, à la demande du gérant, par ordonnance du président du tribunal de commerce, statuant sur requête”.
Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL)
Article L. 223-31 alinéa 2 du code de commerce : “Dans ce cas, le rapport de gestion, l’inventaire et les comptes annuels sont établis par le gérant. L’associé unique approuve les comptes, le cas échéant après rapport des commissaires aux comptes, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice”.
Société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU)
Article L. 227-9 alinéa 3 du code de commerce : “Dans les sociétés ne comprenant qu’un seul associé, le rapport de gestion, les comptes annuels et le cas échéant les comptes consolidés sont arrêtés par le président. L’associé unique approuve les comptes, après rapport du commissaire aux comptes s’il en existe un, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice. L’associé unique ne peut déléguer ses pouvoirs. Ses décisions sont répertoriées dans un registre. Lorsque l’associé unique, personne physique, assume personnellement la présidence de la société, le dépôt, dans le même délai, au registre du commerce et des sociétés de l’inventaire et des comptes annuels dûment signés vaut approbation des comptes sans que l’associé unique ait à porter au registre prévu à la phrase précédente le récépissé délivré par le greffe du tribunal de commerce”.
Modèles de requête
Modèle n° 1 – Requête pour une SA ou une SARL
XXX [en-tête de la société : cliquer ici pour accéder au modèle]
Madame la présidente ou Monsieur le président
du tribunal de commerce de XXX [ville]
XXX [adresse]
Le XXX [date] à XXX [lieu]
Requête aux fins de prolongation du délai de réunion de l’assemblée générale ordinaire annuelle
Madame la présidente ou Monsieur le président,
Nous avons l’honneur de vous exposer que la société a clôturé son exercice social le XXX [date de clôture]. En application des dispositions légales, l’assemblée générale statuant sur les comptes et les rapports de cet exercice devrait se tenir dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice social, soit au plus tard le XXX [date limite pour l’approbation des comptes].
[Adapter la motivation de la requête. L’exemple ci-dessous concerne une hypothèse dans laquelle l’assemblée générale a été convoquée dans les délais, mais le commissaire aux comptes a demandé des modifications des comptes et n’a pas émis ses rapports.]
Nous avons dûment convoqué, dans les délais requis, l’assemblée générale pour le XXX [date de réunion]. Cependant, il apparaît que l’assemblée générale ne pourra pas, à cette date, statuer conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables. En effet, le commissaire aux comptes de la société a formulé diverses observations techniques sur les comptes annuels, les annexes et le rapport de gestion. Dans ces conditions, le commissaire aux comptes n’a pas émis ses rapports et nous a demandé de formuler une requête aux fins de prorogation du délai de réunion de l’assemblée générale ordinaire annuelle.
Ainsi, conformément aux articles XXX [POUR UNE SA : L. 225-100 alinéa 1 et R. 225-64 // POUR UNE SARL : L. 223-26 alinéa 1 et R. 223-18-1] du code de commerce, nous sollicitons un délai supplémentaire de XXX [délai sollicité, en général : trois mois], expirant le XXX [date], afin de permettre au commissaire aux comptes d’effectuer sa mission et à l’assemblée générale de se tenir conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables, dans le respect du droit d’information de ses membres.
Nous joignons à la présente requête :
- la copie du bilan et du compte de résultat de l’exercice précédent,
- [s’ils sont établis : le bilan et le compte de résultat prévisionnels de l’exercice en cours,]
- un chèque de XXX [vérifier le montant, lors de la dernière vérification : 33,03 euros] libellé à l’ordre du greffe du tribunal de commerce, en règlement du coût de la formalité.
Nous vous prions d’agréer, Madame la présidente ou Monsieur le président, nos salutations distinguées.
[AUTEUR DE LA DEMANDE – POUR UNE SARL : Le gérant // POUR UNE SA : Le conseil d’administration // Le directoire]
XXX [nom du signataire et qualité (fonction) – attention, pour la SA, il est conseillé de vérifier que le signataire a la qualité de représentant légal : cf. guide ci-dessus]
Signature :
Modèle n° 2 – Requête pour une EURL ou une SASU
XXX [en-tête de la société : cliquer ici pour accéder au modèle]
Madame la présidente ou Monsieur le président
du tribunal de commerce de XXX [ville]
XXX [adresse]
Le XXX [date] à XXX [lieu]
Requête aux fins de prolongation du délai d’approbation des comptes
Madame la présidente ou Monsieur le président,
Nous avons l’honneur de vous exposer que la société a clôturé son exercice social le XXX [date de clôture]. En application des dispositions légales, les décisions de l’associé unique statuant sur les comptes et les rapports de cet exercice devraient intervenir dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice social, soit au plus tard le XXX [date limite pour l’approbation des comptes].
[Adapter la motivation de la requête. L’exemple ci-dessous concerne une hypothèse dans laquelle le commissaire aux comptes a demandé des modifications des comptes et n’a pas émis ses rapports.]
Nous avons dûment préparé, dans les délais requis, les comptes annuels ainsi que les autres documents exigés. Cependant, il apparaît que l’associé unique ne pourra pas, dans le délai de six mois fixé par l’article XXX [pour une EURL : L. 223-31 alinéa 2 // pour une SASU : L. 227-9 alinéa 3] du code de commerce, statuer conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables. En effet, le commissaire aux comptes de la société a formulé diverses observations techniques sur les comptes annuels, les annexes et le rapport de gestion. Dans ces conditions, le commissaire aux comptes n’a pas émis ses rapports et nous sommes donc conduits à formuler la présente requête aux fins de prorogation du délai d’approbation des comptes.
Ainsi, nous sollicitons un délai supplémentaire de XXX [délai sollicité, en général : trois mois], expirant le XXX [date], afin de permettre au commissaire aux comptes d’effectuer sa mission et à l’associé unique d’adopter ses décisions conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables, dans le respect de son droit d’information.
Nous joignons à la présente requête :
- la copie du bilan et du compte de résultat de l’exercice précédent,
- [s’ils sont établis : le bilan et le compte de résultat prévisionnels de l’exercice en cours,]
- un chèque de XXX [vérifier le montant, lors de la dernière vérification : 33,03 euros] libellé à l’ordre du greffe du tribunal de commerce, en règlement du coût de la formalité.
Nous vous prions d’agréer, Madame la présidente ou Monsieur le président, nos salutations distinguées.
[AUTEUR DE LA DEMANDE – POUR UNE EURL : Le gérant // POUR UNE SASU : Le président]
XXX [nom du signataire]
Signature :
© FB Juris / idroit.co