Par Franck BEAUDOIN, avocat, FB Juris
Publié sur idroit.co le 10 juin 2020
Synthèse
Le comité social et économique (CSE) peut décider de recourir à une expertise, dont le coût est soit supporté intégralement par l’employeur, soit partagé entre le CSE (à 20%) et l’employeur (à 80%), soit supporté intégralement par le CSE, suivant la nature de l’expertise.
Références : articles L. 2315-78 et suivants et R. 2315-45 et suivants du code du travail. En l’absence de précision, les articles cités ci-après sont ceux du code du travail.
Objet de l’expertise
Le comité social et économique (CSE) peut, le cas échéant sur proposition des commissions constituées en son sein, décider de recourir à un expert-comptable ou à un expert habilité, dans certaines situations (L. 2315-78).
Un accord d’entreprise, ou à défaut un accord conclu entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel, détermine le nombre d’expertises dans le cadre des consultations récurrentes sur une ou plusieurs années (L. 2315-79).
Expertise dans le cadre des consultations récurrentes
L’expertise peut intervenir dans le cadre des consultations récurrentes :
- Expertise dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise (L. 2315-87) ;
- Expertise dans le cadre de la consultation sur la situation économique et financière (L. 2315-88 s.) ;
- Expertise dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi (L. 2315-91).
Autres cas de recours à l’expertise
D’autres cas de recours à l’expertise sont prévus :
- En cas d’opération de concentration (L. 2315-92 et L. 2312-41) ;
- Dans le cadre de l’exercice du droit d’alerte économique (L. 2315-92 et L. 2312-64) ;
- En cas de licenciements collectifs pour motif économique (L. 2315-92 et L. 1233-34 s.) ;
- En cas d’offre publique d’acquisition (L. 2315-92 et L. 2312-42 s.) ;
- Dans le cadre de la préparation des négociations prévues aux articles L. 2254-2 et L. 1233-24-1 (L. 2315-92) ;
- Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement (L. 2315-94 1°) ;
- En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévus au 4° de l’article L. 2312-8 (L. 2315-94 2°) ;
- Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle (L. 2315-94 3°).
Expert habilité
Le comité social et économique doit choisir l’expert en fonction de la nature de l’expertise. Suivant celle-ci, l’expert peut être :
- un expert-comptable,
- un expert habilité,
- un autre expert technique.
L’expertise doit être confiée à un expert-comptable dans la majorité des cas (L. 2315-92).
Un expert habilité doit être nommé pour les expertises suivantes (L. 2315-94) :
- Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;
- En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévus au 4° de l’article L. 2312-8.
Un expert habilité ou un autre expert technique peut être nommé pour l’expertise suivante (L. 2315-95) :
- Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle.
L’habilitation de l’expert auquel le comité social et économique peut faire appel, en application de l’article (L. 2315-94), est une certification justifiant de ses compétences. Cette certification est délivrée par un organisme certificateur accrédité par le comité français d’accréditation ou par tout autre organisme d’accréditation mentionné à l’article R. 4724-1 (R. 2315-51).
Déroulement de l’expertise
Début de l’expertise
L’expert demande à l’employeur, au plus tard dans les trois jours de sa désignation, toutes les informations complémentaires qu’il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L’employeur répond à cette demande dans les cinq jours (R. 2315-45).
À compter de la désignation de l’expert par le comité social et économique, les membres du comité établissent au besoin et notifient à l’employeur un cahier des charges. L’expert notifie à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise, dans un délai de dix jours à compter de sa désignation (L. 2315-81-1 et R. 2315-46).
Délais de l’expertise
En cas d’expertise relative aux opérations de concentration, l’expert remet son rapport dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision de l’Autorité de la concurrence ou de la Commission européenne saisie du dossier (R. 2315-47 al. 2).
En cas d’expertise dans le cadre des consultations visées par le code du travail pour lesquelles la loi n’a pas fixé de délai spécifique (R. 2312-5), l’expert remet son rapport au plus tard quinze jours avant l’expiration des délais de consultation du comité social et économique mentionnés aux second et troisième alinéas de l’article R. 2312-6 (R. 2315-47 al. 1).
Dans les autres cas, à défaut d’accord d’entreprise ou d’accord entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel, l’expert remet son rapport dans un délai de deux mois à compter de sa désignation. Ce délai peut être renouvelé une fois pour une durée maximale de deux mois, par accord entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel (R. 2315-47 al. 3).
Droits et obligations de l’expert
Pour l’ensemble des expertises visées par le code du travail, les experts ont libre accès dans l’entreprise pour les besoins de leur mission (L. 2315-82).
L’employeur fournit à l’expert les informations nécessaires à l’exercice de sa mission (L. 2315-83).
L’expert est tenu aux obligations de secret et de discrétion définies à l’article L. 2315-3, c’est-à-dire pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication et à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur (L. 2315-84).
L’étendue des droits de l’expert varie en fonction des fondements de l’expertise.
Expertise dans le cadre de la consultation sur la situation économique et financière
La mission de l’expert-comptable porte sur tous les éléments d’ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l’appréciation de la situation de l’entreprise (L. 2315-89).
Pour opérer toute vérification ou tout contrôle entrant dans l’exercice de ses missions, l’expert-comptable a accès aux mêmes documents que le commissaire aux comptes de l’entreprise (L. 2315-90).
Autres cas de recours à l’expertise visés à l’article L. 2315-92
L’expert-comptable a accès aux informations dans les conditions suivantes (L. 2315-93). L’employeur fournit à l’expert les informations nécessaires à l’exercice de sa mission (L. 2315-83). Pour opérer toute vérification ou tout contrôle entrant dans l’exercice de ses missions, l’expert-comptable a accès aux mêmes documents que le commissaire aux comptes de l’entreprise (L. 2315-90).
Lorsqu’il est saisi dans le cadre d’une opération de concentration prévue à l’article L. 2312-41 ou d’une opération de recherche de repreneurs, l’expert a accès aux documents de toutes les sociétés intéressées par l’opération.
Lorsqu’il est saisi dans le cadre d’une offre publique d’acquisition dans les conditions prévues aux articles L. 2312-42 à L. 2312-52, l’expert-comptable a accès aux documents nécessaires à l’élaboration du rapport prévu à l’article L. 2312-45.
En cas d’exercice du droit d’alerte économique, le comité social et économique peut se faire assister, une fois par exercice comptable, d’un expert-comptable, convoquer le commissaire aux comptes et s’adjoindre avec voix consultative deux salariés de l’entreprise choisis pour leur compétence et en dehors du comité social et économique. Ces salariés disposent de cinq heures chacun pour assister le comité ou la commission économique en vue de l’établissement d’un rapport au titre du droit d’alerte économique. Ce temps est rémunéré comme temps de travail (L. 2312-64). Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, l’expert a notamment accès aux informations que l’employeur doit mettre à la disposition du comité social et économique chaque trimestre, à savoir :
- L’évolution générale des commandes et l’exécution des programmes de production ;
- Les éventuels retards de paiement de cotisations sociales par l’entreprise ;
- L’évolution des effectifs et de la qualification des salariés par sexe.
Financement de l’expertise
Prise en charge intégrale par l’employeur
Les frais d’expertise sont pris en charge intégralement par l’employeur dans les cas suivants (L. 2315-80 1°) :
- Expertise dans le cadre de la consultation récurrente sur la situation économique et financière (L. 2315-88),
- Expertise dans le cadre de la consultation récurrente sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi (L. 2315-91),
- Expertise en cas de licenciements collectifs pour motif économique (L. 2315-92 3°),
- Expertise lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement (L. 2315-94 1°),
- Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, expertise en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle en l’absence de tout indicateur relatif à l’égalité professionnelle prévu à l’article L. 2312-18 (L. 2315-94 3°).
Prise en charge répartie entre l’employeur et le CSE
Les frais d’expertise sont pris en charge par le comité, sur son budget de fonctionnement, à hauteur de 20 %, et par l’employeur, à hauteur de 80 %, dans les cas suivants (L. 2315-80 2°) :
- Expertise dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise (L. 2315-87),
- Consultations ponctuelles hors celles visées ci-dessus, intégralement prises en charge par l’employeur.
Ainsi, notamment, lorsque le comité économique et social décide de nommer un expert-comptable dans le cadre de l’exercice de son droit d’alerte économique, ou en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travailles, les frais d’expertise sont supportés à 20% par le comité et à 80% par l’employeur.
Par exception, l’employeur prend intégralement en charge les frais de ces expertises, lorsque le budget de fonctionnement du comité social et économique est insuffisant pour couvrir le coût de l’expertise et n’a pas donné lieu à un transfert d’excédent annuel au budget destiné aux activités sociales et culturelles prévu à l’article L. 2312-84 au cours des trois années précédentes (L. 2315-80 3°).
Prise en charge intégrale par le CSE
Pour la préparation de ses travaux, le comité social et économique peut faire appel à tout type d’expertise, autre que celles visées dans le code du travail, auquel cas l’expertise est intégralement rémunérée par ses soins (L. 2315-81).
Contestations
L’employeur peut saisir le juge judiciaire dans un délai de dix jours (L. 2315-86 et R. 2315-49) de :
- La délibération du comité social et économique décidant le recours à l’expertise s’il entend contester la nécessité de l’expertise ;
- La désignation de l’expert par le comité social et économique s’il entend contester le choix de l’expert ;
- La notification à l’employeur du cahier des charges et des informations prévues à l’article L. 2315-81-1 s’il entend contester le coût prévisionnel, l’étendue ou la durée de l’expertise ;
- La notification à l’employeur du coût final de l’expertise s’il entend contester ce coût.
+ LIRE > Work – Expertise decided by the social and economic committee (work council)
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